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Stratégie d’élévation marketing: Tribune

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Stratégie d'élévation : et si c'était le moment de redescendre sur terre ?

Introduction

Depuis plusieurs années, un terme s’est imposé dans le marketing parfum et beauté : l’élévation.
Élever l’image, les prix, le statut, les codes. Le mot est devenu un réflexe, presque une stratégie en soi.

Pourtant, derrière cette ambition légitime, un paradoxe s’installe : le marché ralentit, les consommateurs changent, et la promesse d’élévation se heurte parfois à la réalité du terrain.

Cette page propose une lecture plus nuancée : non pas abandonner l’élévation, mais la réancrer dans ce qui fait réellement la valeur d’un parfum — le produit, la peau, l’expérience, la relation.

Voici donc le texte complet, pensé comme une analyse ouverte : une invitation à repenser l’équilibre entre image, preuve et vérité produit.

« Le parfum n’a pas besoin de viser plus haut : il a besoin de redescendre à hauteur de peau. »

Depuis trois ans, un même mot sature les briefs marketing : « élévation ».
Élévation de la marque, de l’image, du prix. Comme si tout l’avenir du parfum tenait dans cette injonction verticale : monter. Devenir plus luxe, plus mode, plus premium, plus désirable.

Dans le même temps, les réalités chiffrées sont beaucoup plus modestes : un marché qui ralentit, des volumes qui se tendent, et des projections où faire flat d’une année sur l’autre devient un objectif respectable.

Ce contraste dit quelque chose d’inconfortable : l’industrie a pris de la hauteur au moment précis où le sol commençait à se dérober.

Des réflexes très concrets

La logique d’élévation a produit des réflexes immédiats.
On a durci les codes visuels, raffermi la posture, multiplié les signaux de prestige.

On a mis en scène le flacon comme un totem — pensé pour être photographié, mis en avant en vitrine, relayé sur les réseaux.

On a enveloppé la hausse des prix dans un discours d’exclusivité et de statut, en présupposant que le consommateur suivrait, presque par réflexe.

Pendant ce temps, celui-ci faisait face à l’inflation, découvrait les dupes, s’informait auprès de communautés expertes, développait une culture produit qui dépasse largement les argumentaires officiels.
Le décalage entre ce qu’on lui montrait et ce qu’il vivait s’est creusé.

L’effet amplificateur des plateformes

Les plateformes sociales, TikTok en tête, ont amplifié ce mouvement.
Elles ont permis de faire du parfum un motif spectaculaire, une matière à trend, un accessoire narratif idéal.

Les campagnes ont été conçues pour l’algorithme : format court, codes natifs, créateurs identifiés, effets viraux. Des marques se sont retrouvées en tête des classements de visibilité, au cœur de conversations massives.

Mais trop souvent, ces succès d’audience ne se sont pas traduits en dynamique commerciale à la hauteur du bruit généré.
On a confondu domination symbolique du flux et création de valeur réelle.

Être n°1 en vues ne suffit pas à nourrir un P&L.

L’angle mort : la base historique

Au cœur de cette impasse se trouve un angle mort : la base historique.

À force de parler élévation, on a cessé de se demander comment se sentaient celles et ceux qui achetaient la marque avant la vague de repositionnement.

Ils ont vu les prix augmenter, les codes se lisser, les discours se sophistiquer.

Certains ne se reconnaissent plus dans des univers trop lointains de leur réalité.
D’autres arbitrent, renoncent ou se tournent vers des alternatives perçues comme plus honnêtes dans le rapport promesse/prix.

Dans ces conditions, l’élévation ne hisse plus la marque :
elle la détache, elle la place au-dessus de son propre socle.

Une aspiration plus discrète, mais décisive

Face à ce constat, une autre aspiration émerge — plus discrète mais déterminante : revenir au produit lui-même.
Au jus, à la manière dont il vit sur la peau, à la relation qu’il crée.

Parler de nouveau de sillage, de tenue, de caractère, d’émotion olfactive.

Redonner de la légitimité à ceux qui incarnent le parfum au quotidien : conseillers en boutique, passionnés, communautés spécialisées, micro-créateurs qui parlent d’abord de ce qu’ils sentent plutôt que de ce qu’ils montrent.

Ce n’est pas un retour en arrière nostalgique :
c’est la prise de conscience qu’un parfum ne peut pas être durablement piloté comme un simple objet d’image.

Replacer l’élévation à sa juste place

La question n’est donc plus de savoir s’il faut abandonner l’élévation, mais de la recontextualiser.

L’élévation ne peut plus être un objectif nu, déconnecté du produit et du client.
Elle doit devenir la conséquence d’un alignement réussi entre :

  • ce que la marque promet,

  • ce que le jus délivre,

  • ce que le prix exige,

  • et ce que l’expérience, du digital au point de vente, fait réellement vivre.

Le prochain cycle stratégique ne se jouera pas dans la surenchère visuelle,
mais dans cette exigence d’alignement.

Là où peut naître une nouvelle synergie

C’est à cet endroit précis qu’une nouvelle synergie peut émerger.

Entre image et preuve : des récits forts, soutenus par des démonstrations tangibles.
Entre plateformes et retail : des contenus qui donnent réellement envie d’essayer, et des expériences de conseil qui prolongent ce désir.
Entre mass et niche : la puissance des grandes franchises enrichie par la précision et la sincérité de démarches plus pointues.
Entre algorithmes et humains, enfin : accepter que la conversation la plus décisive ne se joue pas uniquement dans le fil d’actualité, mais dans le face-à-face avec un client qui, aujourd’hui, sait très bien ce que vaut ce qu’on lui vend.

Redescendre à hauteur de peau

Le parfum n’a pas besoin de renoncer à l’ambition.
Il a besoin de redescendre à hauteur de peau.

La vraie question n’est plus :
« Comment paraître plus haut ? »

Mais :
« Que faisons-nous, concrètement, pour mériter la place que nous demandons dans la vie, sur la peau et dans le budget de ceux qui nous choisissent ? »

C’est à cette condition que l’élévation redeviendra ce qu’elle aurait toujours dû être :
non pas une posture, mais le résultat naturel d’une promesse tenue.

About Visionary Minds & Dix Sept Paris

Visionary Minds est un podcast produit par Dix Sept Paris, une agence créative spécialisée dans le luxe et la beauté. À travers des conversations avec des leaders du secteur, nous explorons les idées, les évolutions culturelles et les cadres créatifs qui façonnent l’avenir du luxe, en offrant des analyses continues sur la clean luxury beauty à destination des marques et des décideurs.

Notre mission : ouvrir des conversations avec celles et ceux qui redéfinissent leur industrie — et offrir une source d’inspiration stratégique pour les marques, les créatifs et les leaders.

Cette Carte Blanche s’inscrit dans notre volonté de partager des analyses approfondies, des perspectives sectorielles et un dialogue créatif authentique.

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